Double fonction
(Discours du Rabbi, Likouteï Si’hot, tome 37, page 1)
Le verset Tsav 6, 4 dit que : «le Cohen ôtera ses vêtements et il revêtira d’autres vêtements, il fera sortir la cendre (1) à l’extérieur du campement, dans un endroit pur».
Rachi commente ce verset de la manière suivante : «il ôtera ses vêtements : c’est une attitude de bienséance (2). Il ne doit pas salir, en faisant sortir les cendres, des vêtements dont il se sert en permanence (3). En effet, on ne verse pas un verre à son maître en portant les vêtements que l’on avait en faisant la cuisine pour son maître. C’est la raison pour laquelle il revêtira d’autres vêtements, d’une valeur moindre (4)».
Ainsi, en signe de bienséance et de respect, le Cohen qui a été désigné pour faire sortir du Sanctuaire les cendres se trouvant sur l’autel devait, au préalable, ôter les vêtements d’apparat qu’il portait, pendant qu’il effectuait son service et endosser ceux qui sont réservés à ces travaux plus salissants.
On peut, toutefois, se poser la question suivante : si le travail de la cuisine est effectivement inférieur, moins propre, pourquoi ne pas le séparer complètement de tous les autres actes du service, importants et propres ? Pourquoi ne pas nommer un Cohen spécifiquement chargé de faire sortir les cendres du Sanctuaire, n’assumant aucune autre mission (5) ?
En fait, la Torah délivre, dans ce passage, un enseignement significatif, s'appliquant à chaque Juif, qui est, par nature, un Cohen (6), celui qui effectue le service du Saint béni soit-Il. Ce verset souligne donc qu’il n’y a pas de personnes uniquement chargées de verser le verre et d’autres qui ont pour seule tâche de faire la cuisine. Nul n’est habilité à définir un acte du service comme «inférieur», par rapport à un autre, qui est «important» (7).
La soumission à D.ieu doit être totale (8). Il est indispensable de verser le verre, de mettre en pratique toutes les Mitsvot qui diffusent la Lumière de D.ieu dans le monde (9). Mais, l’on doit aussi faire sortir les cendres, se consacrer aussi à la préparation de la Mitsva (10), même si celle-ci semble moins glorieuse.
Ce verset énonce, de cette façon, des directives très claires, qui permettent de tracer un chemin à celui qui désire assumer pleinement le service de D.ieu, dans sa dimension morale :
«Le Cohen ôtera ses vêtements» : Il est parfois nécessaire de se défaire des vêtements d’apparat, somptueux et majestueux (11).
«Et, il revêtira d’autres vêtements» : On devra, à la place de ceux-ci, porter les vêtements du peuple, les plus simples.
«ll fera sortir la cendre» : C’est de cette façon que l’on fera sortir les déchets et que l’on nettoiera le lieu (12).
«A l'extérieur du campement» : Pour cela, il peut s'avérer nécessaire de quitter la maison d’étude, de sortir du campement appartenant au domaine de la sainteté. C’est de cette façon que l’on pourra rapprocher de la pratique juive tous ceux qui n’ont pas eu le mérite de recevoir une éducation traditionnelle et qui vivent encore dans une pénombre intolérable. Il faut donc les faire revenir vers leur Père Qui se trouve dans les cieux.
En adoptant une telle attitude (13), on obtiendra que le Saint béni soit-Il en fasse de même, qu’Il agisse «mesure pour mesure» (14). Il rassemblera Lui-même les exilés d'Israël, éparpillés aux quatre coins de la terre. Il prendra chacun par la main (15), lui fera quitter l’exil et le conduira vers la délivrance véritable et complète, avec la venue de notre juste Machia’h.
(1) Qui s’est accumulée sur l’autel, par la combustion des sacrifices.
(2) Plus qu'une loi formelle.
(3) Lorsqu'il est à l’intérieur du Sanctuaire.
(4) Dès lors qu’ils sont destinés à des travaux moins importants.
(5) De la sorte, le changement de vêtements devient inutile, puisque le Cohen effectuant le service dans le sanctuaire portera toujours les mêmes et celui qui est préposé aux cendres ne devra pas se changer non plus.
(6) Conformément à l'affirmation bien connue du Rambam, dans le Michné Torah, selon laquelle : «ceci ne concerne pas uniquement la tribu de Lévi, mais quiconque est porté par son cœur à assumer le service de Dieu».
(7) Nos Sages, dont la mémoire est une bénédiction, disent : «Ne t’emploie pas à soupeser les Mitsvot, car tu ne connais pas leur récompense», établissant leur valeur.
(8) Et, celui qui est réellement soumis ne sélectionne pas les actes de son service.
(9) Sans distinction entre elles.
(10) Qui n’est pas elle-même une Mitsva, même si elle est indispensable pour la mettre en pratique.
(11) Le service de D.ieu intègre également un acte banal de l'existence quotidienne.
(12) Afin de le préparer à être la demeure de Dieu, au sein de ce monde matériel.
(13) En sacrifiant la satisfaction de ses propres besoins pour rechercher celle des autres.
(14) De la manière dont les hommes agissent envers Lui.
(15) Ainsi qu’il est dit : «Vous serez cueillis, un à un, enfants d'Israël».
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